Inflation VS stagflation?

L’inflation atteint des niveaux records et menace certains pans de l’économie. Quelles sont les causes de l’inflation, pourquoi devons-nous la contenir et que pouvons-nous faire en tant qu’individus? On en discute avec Sébastien Mc Mahon, notre stratège en chef et économiste sénior chez iA Groupe financier.

Ashleay : Bienvenue au balado À vos intérêts! de iA Groupe financier dans lequel on discute de l'essentiel de l'actualité économique et de ses impacts sur vos finances en moins de dix minutes. Le sujet de l'heure : l'inflation. Pourquoi en parlons-nous autant? Mon nom est Ashleay. Mon collègue Sébastien Mc Mahon, stratège en chef et économiste senior chez iA Groupe financier, est ici pour répondre à cette interrogation. Bonjour Sébastien!

Sébastien : Bonjour Ashleay.

Ashleay : Pourquoi parle-t-on autant de l'inflation? Certains disent qu'on surréagit. Est-ce qu'il faut absolument faire quelque chose?

Sébastien : Je te dirais qu'on en parle beaucoup parce que ça fait longtemps qu'on n'a pas vu de l'inflation à un niveau aussi élevé que récemment après la COVID. Donc je te dirais qu’en 2022, de voir l'inflation au Canada à 6,8 % en début d'année, aux États-Unis on est au-dessus de 8 %, on doit se projeter au début des années 1990 pour voir de l'inflation aussi élevée. On en parle beaucoup parce que ça faisait longtemps qu'on n'avait pas vu ça. Donc ça, c'est le premier point. Mais on en parle beaucoup parce que dans les années 80, l'inflation, c'était un problème. Je vais peut-être prendre le temps de faire un petit cours d'histoire 101 sur l'inflation ici. Dans les années 80, quand je disais que l'inflation était bien ancrée, c'était considéré comme étant l'ennemi économique à abattre. Ça venait des années 70. Dans les années 70, peut-être que vous ne vous en rappelez pas, ceux qui écoutent le podcast ici aujourd'hui, mais on a eu un choc pétrolier assez important. Les pays producteurs de pétrole se sont rendu compte qu'on peut gérer la quantité de pétrole produite pour pousser les prix à la hausse, pour faire plus d'argent. Puis ça fait en sorte que, bien sûr, tout ce qu'on consomme à peu près transite quelque part par un véhicule à essence, donc ça fait de l'inflation qui a été assez importante. Ce choc-là a fait en sorte que dans les années 80, bien les attentes inflationnistes, puis c'est vraiment ça l'enjeu, les attentes d'inflation sont devenues assez élevées, puis sont demeurées assez élevées. Quand je parle d'attentes inflationnistes, ça veut dire que monsieur et madame Tout-le-Monde, les entreprises, tout le monde regardent dans les dernières années, l'inflation c'était 5, 8, 10, 12 %. Donc quand on va signer la prochaine convention collective, on va faire mettre une clause dedans que notre salaire doit être ajusté selon l'inflation à 5, 8, 10, 12 %. Les producteurs, les magasins qui achètent des producteurs, tout le monde dans la chaîne d'approvisionnement, les entreprises se sont mis à mettre des clauses pour se protéger de l'inflation aussi. Donc ça fait en sorte que c'est devenu un peu une histoire qui s'est réalisée d'elle-même. Donc on a été pris avec de l'inflation élevée parce que tout le monde s'attendait à ce qu’elle, arrive, ont signé les contrats en conséquence, donc c’est arrivé. Donc c'est un peu ça qu'on veut éviter. C'est pour ça qu’aujourd'hui, on en parle autant de l'inflation. Ça fait longtemps qu'on ne l'a pas vue, mais surtout les banques centrales. Les banques centrales, ce sont les entités gouvernementales qui sont responsables de la politique monétaire, donc leur objectif à elles, c'est de faire en sorte que l'inflation demeure relativement basse et stable. Donc on agit fortement pour s'assurer que les gens croient que l'inflation n’est pas revenue à des niveaux qu'on avait dans les années 80 pour la prochaine décennie. Donc on veut s'assurer qu'on reste là avec une inflation relativement stable et faible, comme on a vécu dans les dix dernières années du côté des banques centrales. Il y a ce morceau-là, puis aussi, on en parle beaucoup, parce que quand il y a de l'inflation qui est élevée puis qui est volatile, l'inflation a tendance à détruire le pouvoir d'achat des moins fortunés. Donc ce n'est pas tout le monde qui va voir son salaire augmenter selon le rythme de l'inflation. Donc on détruit du pouvoir d'achat, ça fait en sorte que ça envenime la pauvreté de certains ménages. Pour les entreprises, quand les prix fluctuent, c'est difficile de prévoir. Donc on avait des enjeux de gestion de ce côté-là. Et surtout, les taux d'intérêt ont tendance à être poussés à la hausse fortement quand on a des poussées d'inflation qui sont fortes aussi. Donc ça donne un frein à la croissance. Donc il y a plusieurs choses là-dedans. Et puis c'est pour ça qu'on a des cibles d'inflation aujourd'hui qui sont relativement strictes pour éviter de revivre ce qu'on avait vécu dans les années 80.

Ashleay : Parfait. Peux-tu m'expliquer les banques centrales? Qui sont les banques centrales?

Sébastien : Les banques centrales, au Canada, c'est la Banque du Canada et aux États-Unis, on parle de la Réserve fédérale. En Europe, il y a la Banque centrale européenne, donc chacun des pays a un gouvernement. Le gouvernement va nommer quelqu'un à la tête de la banque centrale. La banque centrale, c'est elle qui va gérer la politique monétaire, puis la politique monétaire, le morceau le plus important que vous avez besoin de savoir, c'est le taux directeur, puis le taux directeur, c'est le taux d'intérêt à court terme. Ça, ça a un impact sur vos hypothèques à taux variable. Ça a un impact sur les taux préférentiels des banques, donc le taux d'intérêt qui est lié à votre marge de crédit. Donc l'idée, c'est que si l'économie va trop bien, si elle est en surchauffe, il y a de l'inflation qui apparaît. On monte le taux directeur pour ralentir l'économie pour essayer de ralentir l'inflation. Puis, dans le sens contraire, si l'économie a des difficultés, on va baisser les taux d'intérêt pour que ça soit plus facile d'emprunter, coûte moins cher, pour relancer l'économie.

Ashleay : Excellent, excellent! Et est-ce que c'est simplement une question de niveau pour l'inflation?

Sébastien : Non. L'inflation, si elle est très élevée, c'est un enjeu. Donc ça, je viens d'en parler. Mais la volatilité de l'inflation aussi, c'est un enjeu. Donc c'est difficile pour des ménages. Puis c'est difficile pour des entreprises de prévoir, de faire des projets de long terme quand l'inflation oscille par exemple entre 2 et 10 % d'une année à l'autre. Donc on a déjà vécu ça par le passé. Donc ça donne un frein net à la croissance économique quand on a de l'inflation qui oscille beaucoup. Une chose qu'on veut vraiment éviter, ce qui est encore pire que de l'inflation élevée, c'est peut-être paradoxal, mais c'est de la déflation ou de l'inflation négative. Et, un bon exemple, il y a le Japon qui est pris avec cette situation-là, qui a été pris avec cette situation-là pendant la majorité des 20-30 dernières années. Parce que quand les prix ont tendance à aller à la baisse d'une année à l'autre, bien les consommateurs vont avoir tendance à attendre avant d'acheter. Parce que si on veut acheter quelque chose, on se dit que l'année prochaine, ça va coûter moins cher, l'année d'après encore moins cher. Donc les gens ont tendance à dépenser moins. Donc ça nuit à la croissance économique.

Ashleay : Exactement. Donc si, par exemple, je veux m'acheter un électroménager, ça fait en sorte qu'on retarde toujours nos décisions et donc on ne va pas aller aider la croissance économique. Donc on entend souvent parler de la stagflation. Pourrais-tu nous définir ce que ça signifie?

Sébastien : Oui. La stagflation, c'est quand l'inflation est assez élevée et est en train de nuire à la croissance économique. Donc l'économie stagne pendant qu'on a de l'inflation, d'où le mot stagflation. Donc c'est un peu ça qu'on est en train de vivre en 2022. On voit que l'inflation est élevée. L'inflation du côté des prix des aliments, puis des prix de l'énergie et de l'essence surtout, est devenue assez élevée pour faire en sorte que là, on voit qu'on perd du pouvoir d'achat comme consommateur. On paye plus cher pour acheter la même quantité de choses à l'épicerie chaque semaine. On paye plus cher pour mettre de l'essence dans notre voiture. Donc il nous reste moins d'argent dans nos poches ensuite, donc on peut moins s'acheter de choses, donc ça fait une croissance économique qui ralentit. D'où le mot stagflation, une économie qui stagne en raison de l'inflation élevée.

Ashleay : OK, excellent. Donc qu'est-ce qui est mieux finalement?

Sébastien : Bien, la leçon du passé, c'est que l'inflation idéale est positive, mais faible et stable. Donc on a des cibles d'inflation à environ 2 % à travers la planète, c'est assez constant. L'inflation faible, je dirais, dans une bande de 1 à 3 %, c'est un peu le standard qu'on voit. Donc quand l'inflation est stable, c'est facile à prévoir, quand l'inflation est basse, donc on a quand même un incitatif à ne pas trop attendre longtemps pour faire les achats qu'on veut faire, donc c'est ce qu'on dirait en anglais le sweet spot pour la croissance économique.

Ashleay : Excellent. Merci pour cette chronique fort intéressante comme toujours. Puis à bientôt! Vous avez aimé cet épisode et vous aimeriez en apprendre davantage sur l'actualité économique? Abonnez-vous à notre balado À vos intérêts! disponible sur toutes les plateformes. Vous pouvez aussi visiter la page Actualités économiques sur ia.ca et nous suivre sur les réseaux sociaux.

À propos

Sébastien possède près de 20 ans d’expérience dans les secteurs privé et public. En plus de son rôle de stratège en chef et d’économiste sénior, il est également gestionnaire de portefeuilles chez iA Gestion mondiale d’actifs et membre du comité d’allocation d’actifs de la société. Ces fonctions lui permettent d’exprimer sa passion pour les chiffres, les mots et la communication. Sébastien agit en tant que porte-parole de iA Groupe financier et conférencier invité sur les questions qui touchent l’économie et la finance. Avant de se joindre à iA en 2013, il a occupé divers postes dans le secteur de l’économie à l’Autorité des marchés financiers, chez Desjardins et au ministère des Finances du Québec. Sébastien est titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat en économie de l’Université Laval et détient le titre de CFA.

Sébastien Mc Mahon

Vice-président, allocation d'actifs, stratège en chef, économiste sénior et gestionnaire de portefeuilles

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