Une rentrée économique très chargée cet automne

Cet automne, sur la scène économique, le sujet chaud sera bien sûr les élections américaines du 5 novembre prochain. Nous analysons ce qui pourrait se passer à la présidence advenant une victoire démocrate ou républicaine, ainsi qu’au gouvernement, tant au Sénat qu’au Congrès. Nous faisons aussi un survol de l’économie canadienne et mondiale, notamment celle de la Chine.

Ashleay : Bonjour et bienvenue au balado À vos intérêts! Mon nom est Ashleay et je suis comme à l'habitude accompagnée de mon collègue Sébastien Mc Mahon, stratège en chef. Aujourd'hui, on va discuter de la scène économique et de ce à quoi nous attendre à l'automne 2024. Alors bonjour, Sébastien!

Sébastien : Salut, Ashleay! Les saisons changent. On est presque rendu en automne déjà.

Ashleay : Absolument, absolument. Les pumpkin spice s'en viennent. On est rendu là.

Sébastien : Oui. Puis on va aller aux pommes, on va tout faire ça. Mais la scène économique, tu sais, on fait des rentrées à chaque début de saison, puis là, je te dirais que c'est peut-être la plus intéressante depuis un petit bout, là, cette rentrée économique là.

Ashleay : Absolument. Donc Sébastien, quel est le sujet chaud à l'automne?

Sébastien : Le sujet chaud, ça va être bien sûr les élections américaines du 5 novembre prochain. Je vais faire un petit topo d’où on en est aujourd'hui. Juste pour situer tout le monde, on enregistre ça en début septembre, donc dans le monde politique, les choses peuvent toujours changer, mais pour le moment, Kamala Harris mène dans les sondages nationaux. Donc c'est quand même un assez grand exploit de sa part, parce que quand M. Biden s'est retiré de la course, M. Trump avait un grand écart versus M. Biden. Mais là, maintenant, ça s'est renversé. Les sondages, il y en a beaucoup, il y en a tous les jours, donc il faut regarder des agrégateurs de sondages, il faut regarder les tendances. On a tendance à utiliser celui fourni par RealClearPolitics. Il y en a peut-être d'autres, mais RealClearPolitics donne 48,5 % d'intentions de vote à madame Harris contre 46,9 % pour Donald Trump. Donc les sondages nationaux avantagent madame Harris, mais c'est toujours bien compliqué, la politique américaine. Aux États-Unis, c'est un collège électoral. Puis le collège électoral favorise encore Donald Trump. Le collège électoral, c'est très simple : chaque État, dépendamment de la taille de la population de l'État, se fait donner un nombre de grands électeurs, donc un poids qui diffère. Par exemple, le Rhode Island a un tout petit poids et la Californie a un très grand poids. Et puis, quand tu gagnes le vote populaire dans un État, tu ramasses tous les grands électeurs de l'État, sauf deux États qui ont décidé d'être proportionnels. C'est le Maine et le Nebraska, des États un petit peu plus petits. Donc l'important, c'est de gagner les États clés. Puis les États clés, il y a des États qui vont toujours être rouges, il y a des États qui vont toujours être bleus, puis là, maintenant, il y a des États clés qui peuvent changer dépendamment des élections. On regarde beaucoup la Géorgie, on regarde beaucoup la Pennsylvanie, puis on regarde beaucoup la Caroline du Nord. Puis en ce moment, quand on regarde le collège électoral puis qu'on regarde la répartition des votes ou des intentions de vote dans tous les États américains, on voit que Monsieur Trump demeure favorisé par le collège électoral. Donc c'est compliqué, mais en ce moment, je vous dirais que la composition du collège électoral, c'est comme si ça donnait un avantage de plus de 4 % à M. Trump dans les sondages. Donc, si madame Harris mène par moins de 4 %, ça veut dire que M. Trump est avantagé. C'est compliqué. J'espère que j'ai rendu ça simple.

Ashleay : Je saigne un peu du nez, mais ça va. Non, non, c'est une blague!

Sébastien : Puis là, maintenant, ce qu'on peut regarder, par contre, pour essayer de balancer tout ça, c'est le marché des parieurs. Vous savez, les Américains ont tendance à commercialiser beaucoup de choses. Ils ont commercialisé la prise de position sur qui va gagner aux élections, puis on peut aller dans le très fin détail. Mais en ce moment, les parieurs donnent un petit avantage à M. Trump. 50 % pour lui, 49 % pour madame Harris. Il ne faut pas oublier que M. Trump était à 70 % en juillet quand il y a eu la tentative d'assassinat, la convention républicaine où Hulk Hogan est venu déchirer sa chemise… Donc, à ce moment-là, il était à son sommet, à 70 %. Maintenant, il est tombé à 50. Donc, il y a une lune de miel avec madame Harris qui continue, mais on voit que l'impulsion est en train de s'essouffler. Maintenant, ils sont plutôt nez à nez. Quand on regarde le gouvernement, le Sénat devrait aller aux républicains. Les marchés des parieurs donnent 72 % de probabilités. La Chambre devrait aller aux démocrates : 63 % de probabilités selon le marché des parieurs. Si on met tout ça ensemble, on se dirige probablement vers un gouvernement divisé. Donc ça veut dire que ce ne sera pas tout républicain, tout démocrate. Probablement que ça va être un mélange des deux.

Ashleay : OK. Puis qu'est-ce que ça implique, ça?

Sébastien : Bien, je vais y aller peut-être juste pour le gouvernement divisé. Parce que si on avait un raz-de-marée rouge ou un raz-de-marée bleu, c'est sûr qu'il va y avoir plusieurs réformes qui vont s'installer, qui vont consister à baisser les impôts si on est républicains. Puis si c'est démocrate, ça va être plus pour probablement annuler les baisses d'impôts de Donald Trump de sa présidence passée, on va parler beaucoup de santé. Mais si on va dans un gouvernement divisé, que ce soit avec une victoire de Madame Harris ou de Monsieur Trump à la présidence, ça voudrait dire qu'il va y avoir un peu plus d'immobilisme à Washington. Il va y avoir moins de changements importants. Puis ultimement, les marchés ont tendance à aimer ça, un gouvernement divisé, parce que le gouvernement se mêle moins des affaires de tout le monde.

Ashleay : Puis qu'est-ce qu'on devrait surveiller ailleurs dans le monde?

Sébastien : Dans le monde cet automne, il y a plusieurs choses. Il y a l'économie chinoise qui nous interpelle beaucoup, parce qu'on dit toujours que les trois plus grandes économies de la planète, les États-Unis, la zone euro et puis la Chine forment le trépied. Puis généralement, s’il y en a deux sur trois qui vont bien, l'économie mondiale a tendance à bien aller. On sait que l'économie américaine va plutôt bien, même si elle est en train de ralentir. En Europe, je vais en parler dans quelques minutes, mais peut-être qu'on est en train de regarder un petit peu plus vers la hausse que vers la baisse. Mais la Chine, ça reste un gros point d'interrogation. Le secteur résidentiel continue de peser sur la reprise économique post-COVID, malgré les récents changements de réglementation qui devraient permettre de nettoyer des excès dans le secteur résidentiel. Puis ce sont des mesures qui ne sont pas bénignes parce qu'on a eu, par exemple, l'achat par le gouvernement de logements invendus. Donc, il s’est trop bâti de maisons, d'immeubles à logements. Les gouvernements locaux peuvent aller les acheter comme pour essayer de nettoyer un peu le marché. On a fait des suppressions de taux d'intérêt minimum sur les prêts hypothécaires. On a réduit des paiements pour les acheteurs potentiels. Donc, le gouvernement essaie de faire des choses pour rééquilibrer le marché hypothécaire, mais quand même, les prix des maisons neuves sont encore en baisse de 5 % année sur année, puis les prix des reventes baissent de 10 %. Donc, imaginez si votre maison perdait 10 % par rapport à l'année passée. Bien, ça veut dire que votre sentiment de richesse en prend un coup. Puis en Amérique du Nord, là, c'est 45 % au Canada de la richesse des ménages qui est liée à la valeur de la maison. Ça, ce sont les statistiques officielles. Aux États-Unis, c'est 50 % de la valeur des ménages qui est liée à la valeur de la maison. En Chine, c'est 70 %. Ça fait que si le prix de la maison baisse de 10 % dans une année, ça veut dire que l'effet de richesse n’est pas là. Les consommateurs ont moins confiance et consomment moins. Donc une économie qui roule au ralenti.

Ashleay : OK. Puis si on va vers l'Europe?

Sébastien : L'Europe, peut-être de bons petits signes qui sont en train d'émerger, mais pour le moment, l'Allemagne demeure dans un contexte de stagnation. Depuis 2022, la croissance du PIB, c'est nul en réel. Donc il n'y a plus d'activité qui se crée. Les signes positifs commencent à apparaître dans le cycle de crédit. Le crédit, c'est quand même la courroie de transmission de l'économie. Si on achète une maison, une voiture, des meubles, il y a du crédit d'impliqué. Si une entreprise décide de lancer un grand projet d'investissement, il y a du crédit d'impliqué. Donc le crédit, c'est vraiment la courroie de transmission. Puis on voit que le cycle de crédit est en train peut-être de réaccélérer. Donc c'est un signe qui est encore très timide, mais qui est en train d'apparaître. Mais les liens économiques avec la Chine quand même en Europe sont assez serrés, donc on a des attentes modérées, mais disons qu'on se réchauffe en Europe.

Ashleay : Puis au Canada?

Sébastien : Au Canada, vous le savez, on en a parlé beaucoup, c'est le premier pays du G7 qui a procédé avec des baisses du taux directeur. Il y a une autre baisse qui s'en vient cette semaine, en début septembre. Il y a une autre décision à la fin octobre. Il y en a eu une autre à la mi-décembre. Ce sont toutes des dates où on s'attend à avoir d'autres baisses du taux directeur. En début 2025, on devrait continuer aussi, puis les effets positifs devraient commencer à se faire sentir. Quand on regarde par exemple la semaine passée, dans les indicateurs, il y avait l'enquête de la confiance des petites entreprises, de la FCEI – la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante – qui commence à se réaccélérer progressivement. Donc on voit de bons signes. Puis là, on attendait beaucoup la réforme de la politique d'immigration pour réduire la pression sur le marché résidentiel dans les métropoles. Il y a des petits ajustements qui ont été faits là, ce qui fait penser qu'avec le temps, bien, peut-être que la pression va demeurer élevée, mais elle va s'estomper progressivement sur le marché immobilier.

Ashleay : Et parlant de ça, justement, qu'en est-il des marchés?

Sébastien : Les marchés financiers pourraient avoir un automne volatil. Puis le mois de septembre est reconnu pour être un des moins bons mois de l'année. Quand on regarde les données depuis 1954, le mois de septembre, généralement même en deuxième moitié de septembre, c'est là qu'on voit les performances les plus faibles de toute l'année. Une de ces raisons, c'est assez technique : les grandes entreprises américaines ont tendance à racheter leurs propres actions. C'est une façon d'envoyer de l'argent aux actionnaires. Bien, pour des raisons techniques de dates de publication d'états financiers, il y a ce qu'on appelle en anglais un blackout qui est assez généralisé en deuxième moitié de mois. Puis il y a très peu d'entreprises qui rachètent de leurs actions à ce moment-là. Donc le mois de septembre a tendance à être un mois qui est plus difficile pour les actions. Le dollar américain aussi a tendance à être plus faible, mais il y a l'or qui fait généralement bien au mois de septembre. Donc on peut avoir un automne volatil, mais dans un portefeuille bien diversifié, il y a des classes d'actifs qui font bien pendant qu'il y en a d'autres qui font moins bien. Puis finalement, du côté des élections, depuis 1948, quand on regarde la réaction des marchés selon le résultat des élections, comme on disait tantôt, ce sont des gouvernements qui sont divisés. Donc, le président, le Sénat, et puis la Chambre des représentants, ce n'est pas nécessairement le même parti qui ramasse les trois niveaux du gouvernement. Dans ces environnements-là, c'est là qu'on a les meilleures performances de marché. Si on a un gouvernement qui est divisé, ça pourrait être porteur pour les rendements une fois que l'élection de novembre va être passée.

Ashleay : Je comprends. Et pour finaliser : les banques centrales?

Sébastien : Oui, bien les banques centrales, on en a parlé beaucoup dans les dernières années parce qu’il y a eu une hausse synchronisée des taux d'intérêt pour combattre l'inflation. Bien là, on est en train d'avoir une baisse synchronisée à l'extérieur du Japon. Le Japon, qui n'a pas eu à combattre une vague inflationniste, bien maintenant, il fait plusieurs réformes structurelles qui amènent de l'inflation dans le pays. C'est de l'inflation qui est désirée, mais ça vient avec des hausses du taux directeur qui ont créé un petit peu de volatilité au mois d'août. J'ai fait un épisode sans toi – je me sentais bien seul récemment – pour parler de ça. Probablement que cette tendance-là va continuer cet automne : des taux qui baissent partout, mais au Japon à la hausse. Puis ça peut créer, bien sûr, encore de la volatilité sur les marchés.

Ashleay : Et c'est ce qui conclut l'épisode d'aujourd'hui. Merci, Sébastien, d'avoir partagé ce à quoi on devrait s'attendre pour la scène économique à l'automne 2024. Et un gros merci à nos auditeurs et auditrices! N'hésitez pas à nous écrire si vous avez des questions et on vous dit à la semaine prochaine! Merci Sébastien.

Sébastien : Merci Ashleay.

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À propos

Sébastien possède près de 20 ans d’expérience dans les secteurs privé et public. En plus de son rôle de stratège en chef et d’économiste sénior, il est également gestionnaire de portefeuilles chez iA Gestion mondiale d’actifs et membre du comité d’allocation d’actifs de la société. Ces fonctions lui permettent d’exprimer sa passion pour les chiffres, les mots et la communication. Sébastien agit en tant que porte-parole de iA Groupe financier et conférencier invité sur les questions qui touchent l’économie et la finance. Avant de se joindre à iA en 2013, il a occupé divers postes dans le secteur de l’économie à l’Autorité des marchés financiers, chez Desjardins et au ministère des Finances du Québec. Sébastien est titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat en économie de l’Université Laval et détient le titre de CFA.

Sébastien Mc Mahon

Vice-président, allocation d'actifs, stratège en chef, économiste sénior et gestionnaire de portefeuilles

Ce balado ne doit pas être copié ou reproduit. Les opinions exprimées dans ce balado reposent sur les conditions actuelles de marché et peuvent changer sans préavis. Elles ne visent nullement à fournir des conseils en matière de placement. Les prévisions données dans ce balado ne sont pas des garanties de rendement. Elles impliquent des risques, des incertitudes et des hypothèses. Bien que ces hypothèses nous paraissent raisonnables, il n’y a aucune assurance qu’elles se confirment.

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