Notre aperçu de l’économie pour 2025

Sur la scène financière d’ici et d’ailleurs, l’année 2025 sera sans doute marquée par diverses incertitudes. L’ère Trump 2.0, les défis socio-économiques en Chine et en Europe, les tensions géopolitiques ou l’essor fulgurant de l’intelligence artificielle n’en sont que quelques exemples. Un contexte où se logent certains risques, mais aussi d’intéressantes opportunités.

Sébastien : Bonjour tout le monde et bienvenue à un nouvel épisode du balado À vos intérêts! Mon nom est Sébastien Mc Mahon et cette semaine, je suis accompagné de deux illustres collègues. Encore une fois, Marc Gagnon, qui était avec nous au cours des deux dernières semaines. Donc, bonjour Marc!

Marc : Salut Sébastien!

Sébastien : Et mon collègue Alexandre Morin qui est gestionnaire de portefeuilles en revenus fixes. Ton titre exact?

Alexandre : Directeur sénior.

Sébastien : Directeur sénior, mais revenus fixes : on va parler d’obligations. Puis, ce qu’on va faire ici aujourd’hui, bien, dans les deux dernières semaines, on a parlé de l’année 2024, on a fait un tour de l’économie, on a fait un tour des marchés. Maintenant, on va se tourner vers 2025 pour voir ce qui nous attend. Donc, c’est le premier de deux épisodes, puis dans ce premier, on va focaliser sur l’économie. Donc Marc, dans les deux dernières semaines, on disait que l’économie avait été plus solide qu’attendu en 2024. Les marchés avaient été très forts aussi, plus que ce qu’on avait attendu, plus que ce qu’on en disait en fin 2023.

Marc : On disait que c’était un grand cru!

Sébastien : C’était un grand cru. Puis maintenant la question c’est : « Ça, c’est bien beau, mais ça nous mène vers quoi en 2025? » Donc, c’est de ça qu’on va jaser.

Marc : LA question.

Sébastien : Exactement. Puis la question principale, si on entre directement dans le vif du sujet, en 2025, Trump 2.0 à la présidence américaine, qu’est-ce que ça veut dire? Monsieur Trump parlait de réglementations. Réglementations et taxes comme objectifs. Donc, on comprend que ce sont des politiques qui devraient être assez stimulantes pour l’économie. Quand on regarde, nous, quand on fait nos calculs, on s’attend peut-être à ce que ce ne soit pas si positif pour la croissance économique, surtout si on va avec des tarifs, puis une politique commerciale qui est plus « serrante ». Ça pourrait être inflationniste. Il va y avoir des gagnants, il va y avoir des perdants, certainement dans les marchés. C’est un petit peu difficile de prédire aujourd’hui comment le film va se dérouler devant nous. Mais si on commence avec toi, Alexandre, point de vue 2025, Trump 2.0 pour les obligations, qu’est-ce que ça veut dire?

Alexandre : Pour moi, pour les obligations et la classe d’actifs en général, je résume ça en trois mots : incertitude, protectionnisme et déficit. Incertitude parce qu’évidemment, Trump, on connait l’individu maintenant, il aime ça faire beaucoup de bruit. Il faut s’attendre à avoir beaucoup de Trump Tweets. Je ne sais pas quel nom on utilise maintenant avec son nouveau réseau.

Sébastien : Des X, des Truths, je ne le sais pas moi non plus, mais…

Alexandre : Peu importe. Donc ça, ça va causer de la volatilité dans le marché. Donc quand on est gestionnaire d’actifs, il va falloir être capable de séparer le bruit des vrais changements de politiques au niveau des États-Unis. Le protectionnisme, évidemment, l’évidence : les tarifs. Les tarifs s’en viennent. Il y a des menaces qui ont été faites à au-dessus d’une dizaine de pays dans le monde, au niveau des tarifs. Ici au Canada, on est menacé de tarifs de 25 % sur nos exportations de biens aux États-Unis. Même chose pour le Mexique. Pour la Chine, on parle jusqu’à 60 % de tarifs possibles. Donc tout ça, ça va venir un peu, je dirais, faire une jambette à la Réserve fédérale au niveau des gains qu’elle a faits au niveau de la baisse de l’inflation aux États-Unis. Et finalement, peut-être un des points les plus importants pour le marché obligataire, c’est le déficit. Ce qu’on va voir en 2025, c’est jusqu’à quel point Donald Trump est sérieux quand vient le temps de juguler le problème du déficit américain. Le déficit américain est d’à peu près 6,5 à 7 % du PIB. En 2022, il était à 4 %. Donc vraiment, la machine s’emballe rapidement. Pour vous donner un ordre de grandeur, juste les dépenses en intérêts de la dette, ça coûte quelque chose. Les dépenses en intérêts sont passées à 2 % du PIB en 2019, juste avant la pandémie, à 3,3 %. Et au rythme où on va là, on s’en va probablement à 4 %. Donc clairement, c’est insoutenable.

Sébastien : Puis c’est le point de départ qui est inquiétant, parce que Trump arrive, le déficit est déjà élevé et maintenant on paye plus cher en intérêts que pour la défense aux États-Unis. Donc ça donne une bonne idée. Toi, Marc, de ton côté, Trump, qu’est-ce que ça veut dire en 2025?

Marc : Ça veut dire, comme l’a mentionné Alexandre, de l’incertitude, beaucoup d’incertitude. Il a mentionné les tarifs, je n’en rajouterai pas énormément là-dessus. On sait qu’au Canada, ça peut nous faire mal de manière importante. Je rajouterais l’immigration. Qu’est-ce qu’il va faire au niveau de l’immigration? Certainement la réduire. Est-ce qu’on va aller jusqu’à la déportation? Ça, c’est un volet beaucoup plus difficile à faire. Mais si jamais on se rend là, l’impact va être important. Parce qu’il faut toujours se souvenir qu’au niveau de l’inflation qui est soutenable à long terme ou qui perdure, l’inflation qu’on ne veut pas, finalement, les coûts de la main-d’œuvre sont toujours très importants. Alors si on a un problème de main-d’œuvre, une rareté de la main-d’œuvre, les coûts de la main-d’œuvre vont augmenter. Et ça, c’est inflationniste, comme c’est difficile à éviter dans ce genre de situation. Si on a aussi des baisses de taxes, est-ce qu’elles vont être seulement pour les particuliers? Est-ce que les entreprises vont aussi en bénéficier? Ça, ça pourrait être bon un peu pour l’économie, mais en même temps, on va avoir des diminutions de budget. Qui est-ce qui va « gagner », entre guillemets, à la fin? Comme disait Alexandre, le marché des obligations va être extrêmement attentif à tout ça.

Sébastien : Et puis Donald Trump a parlé de beaucoup de choses dans sa campagne, mais il a nommé pour le poste au Trésor Scott Bessent, quelqu’un de Wall Street qui a une politique qu’il appelle le « trois trois trois », qui consiste à réduire le déficit budgétaire à 3 % du PIB. Alex, tu disais tantôt qu’on était environ à six. Donc tout ça, ça retient la croissance.

Alexandre : Ça ne sera pas une mince tâche parce que juste les intérêts, c’est au-dessus de 3 % présentement, donc…

Sébastien : Puis tu sais, si on veut réduire la taille du déficit, ça veut dire qu’on ralentit l’économie parce que c’est une composante importante du PIB, les dépenses gouvernementales. En même temps, on veut pousser la croissance du PIB à 3 % par année. Donc, jongler avec ces deux objectifs-là, c’est difficile. Puis Marc, on en parlait juste avant d’enregistrer, il veut augmenter aussi la production d’énergie par trois millions de barils par jour. Donc tout ça mis ensemble, c’est un plan qui est très ambitieux.

Marc : Les trois premiers, pour moi, c’est presque la quadrature du cercle, là. En tout cas, s’il réussit à faire ça, il a vraiment réussi à tout mettre ses clés en place. Mais au niveau de l’énergie, j’aimerais juste mentionner que ce trois millions-là, il me « chicote » un peu, parce qu’en fait, le Canada exporte aux États-Unis quatre millions de barils par jour. Puis on se rappelle qu’il a menacé le Canada de tarifs et on pense que ça pourrait affecter l’énergie. Beaucoup de gens disent : « Ah non, ça n’arrivera pas, ça va causer de l’inflation et tout ça. » Moi, quand je vois ces trois millions de barils, qui sont à peu près l'équivalent, un peu moins que ce qu’on exporte par jour aux États-Unis, bien, ça me rend un petit peu nerveux. Comme quoi ces menaces de tarifs, il faut les prendre au sérieux.

Sébastien : Ouais, puis ça nous amène à l’économie canadienne. On est à la mi-décembre, au moment où on enregistre ceci. Pour nous, c’était hier que madame Freeland a démissionné de son poste comme ministre des Finances. Elle ne s’entend pas avec le premier ministre Trudeau sur comment naviguer dans cette incertitude-là avec ce qui vient des États-Unis. Toute l’incertitude, les menaces qu’on a de la part de Donald Trump. On sait que probablement à un certain moment, en 2025, il va y avoir un changement de gouvernement chez nous. Ça va être le gouvernement conservateur, fort probablement, qui va prendre les rênes. Vous, de votre côté, si on commence avec toi, Marc, tu investis beaucoup dans les actions canadiennes. Comment est-ce que tout ça, ça vient impacter l’économie canadienne?

Marc : On va y aller dans ce sens-là : s’il n’y a pas de tarifs, je crois que la baisse des taux qu’on a connue en 2024 va permettre à l’économie canadienne de repartir. On sait qu’on a évité la récession de peu. On va repartir et les choses devraient quand même être positives pour l’économie. On sait que la baisse des taux, c’est l’essence qu’on met dans l’auto qui fait que la voiture peut accélérer. On peut aller plus vite, on peut aller plus loin. Alors, je pense que ça, c’est l’espèce de scénario qu’on espère tous. Mais plus il va y avoir des tarifs, plus ils vont être importants, plus ils vont aussi toucher de multiples industries, plus on va s’éloigner un petit peu de ce genre de situation, parce que plus on va affecter notre croissance économique. On a déjà baissé les taux, puis entretemps, vers la fin de l’année, le dollar a déjà perdu beaucoup de valeur. Puis ça aussi, ça commence à m’inquiéter un peu parce que c’est inflationniste en soi. Donc, ça diminue la capacité de la Banque du Canada de répondre aux tarifs en baissant ses taux. Bon, bien sûr, il y aura un peu de jeu de manœuvres dans tout ça, mais c’est quand même un peu plus compliqué pour la Banque du Canada d’intervenir là-dedans. Alors, c’est pour ça que les tarifs deviennent rapidement le point central de comment on envisage 2025.

Sébastien : Oui, puis si tu es la Banque du Canada et même la Réserve fédérale, tu ne peux pas changer ta politique basée sur des anticipations. Est-ce que Trump va faire ceci ou cela? Mais le climat d’incertitude qu’il installe avec ses menaces, quand même, ça ralentit les décisions d’investissement, ça heurte la confiance. Donc, il y a déjà du dommage économique réel qui se fait aussi. Alex, c’est ton pain puis ton beurre d’investir dans les obligations canadiennes. Donc toi, qu’est-ce que tu décodes de tout ça, là?

Alexandre : Bien, au niveau de l’économie canadienne, c’est sûr que les gros nuages noirs proviennent du sud de la frontière, des tarifs de Trump. Il n’y a pas de doute là-dessus. Il ne faut pas négliger aussi, c’est peut-être un point… J’ai de la misère à faire la part des choses, si c’est négatif ou positif pour l’économie, mais il faut comprendre ici, au Canada, qu’on va avoir une politique migratoire plus restrictive. On sait que la population du pays a augmenté rapidement : 41 millions de personnes. Juste en 2023, il y a 1,3 million de nouvelles personnes au Canada. À peu près 100 % de ça, c’était de l’immigration. C’est insoutenable. C’est dur sur nos services publics, c’est dur sur nos infrastructures. Donc c’est pour ça, moi, que je vois un impact mixte au niveau de l’inflation. C’est bon pour le logement. Il va y avoir moins de gens qui vont chercher des logements, donc en théorie, ça devrait freiner un peu l’appréciation du marché hypothécaire canadien. On sait que les maisons sont très très chères ici au Canada relativement à d’autres pays. Mais d’un autre côté, tu réduis ton bassin potentiel de nouveaux travailleurs, donc ça peut être inflationniste. Donc on peut jouer un peu sur les deux panneaux avec la politique migratoire. Peut-être pour revenir à la Banque du Canada, oui, on a de gros nuages noirs qui s’en viennent. Je pense que ce qui est positif quand même pour le Canada, malgré tout, c’est que la Banque du Canada, elle a été proactive. La Banque du Canada, je vous rappelle, ça a été la première banque centrale importante à commencer son cycle de taux baissier, quelques heures avant la Banque centrale européenne au mois de juin dernier. Elle a déjà baissé de 175 points de base, va probablement encore faire plusieurs baisses l’année prochaine. Pas d’une même ampleur, mais quand même, je pense que ça, ça peut amener un petit vent, peut-être, de fraîcheur au niveau de l’économie canadienne, être un vent de dos pour l’économie canadienne qui pourrait nous aider en théorie à passer au travers des mauvais moments qu’on pourrait avoir à cause de Trump. Mais c’est sûr que si Donald Trump va de l’avant avec des tarifs de 25 %, c’est clair que le cycle de baisse de taux au Canada n’est pas terminé. Si ça se trouve, il est peut-être juste commencé.

Sébastien : Donc beaucoup d’incertitude pour l’économie canadienne en 2025, on pourrait tomber dans un scénario assez pessimiste où il y a du dogmatisme à Washington et puis on y va avec ces tarifs-là. Mais si finalement c’est une technique de négociation puis qu’on réussit à s’en sortir de ces tarifs-là, l’économie canadienne devrait quand même bien faire.

Alexandre : Exactement. Puis on a vu, là, le fédéral qui met déjà l’accent sur la frontière Canada-États-Unis, qui est une des demandes de Trump. C’est ça qui est un petit peu différent avec premier mandat. À l’époque, lors de son premier mandat, c’était vraiment tout orienté sur l’économie. Maintenant, il dit : « Bien, je vais vous imposer des tarifs si vous ne fermez pas votre frontière aux nouveaux immigrants. » Ça, c’est nouveau, mais Ottawa va apprendre à négocier avec ça. Puis il y a déjà des pas qui sont faits, je pense, dans la bonne direction.

Sébastien : Parfait, messieurs. Je pense qu’on aurait pu parler le double du temps qu’on vient de faire, mais si je résume pour l’économie, en 2025, beaucoup, beaucoup d’incertitudes. L’économie américaine qui devrait bien faire avec les mesures de Donald Trump, mais est-ce que ça va être aussi bien que ce qu’on entend, que ce qu’on lit? Gros point d’interrogation. Mais tout ça, bien sûr, ça va créer une année intéressante sur les marchés. Et ça sera justement le sujet de notre prochain épisode. On va se demander comment investir à travers une année mouvementée. Donc merci beaucoup, Marc.

Marc : Ça me fait plaisir, Sébastien!

Sébastien : Merci beaucoup Alexandre.

Alexandre : Merci beaucoup, Sébastien et bon succès dans vos investissements en 2025.

Sébastien : Oui, on va en reparler la semaine prochaine. On va essayer de donner de bons conseils. Je dis à tout le monde : « Merci d’être avec nous chaque semaine », et puis on se voit la semaine prochaine.

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À propos

Sébastien possède près de 20 ans d’expérience dans les secteurs privé et public. En plus de son rôle de stratège en chef et d’économiste sénior, il est également gestionnaire de portefeuilles chez iA Gestion mondiale d’actifs et membre du comité d’allocation d’actifs de la société. Ces fonctions lui permettent d’exprimer sa passion pour les chiffres, les mots et la communication. Sébastien agit en tant que porte-parole de iA Groupe financier et conférencier invité sur les questions qui touchent l’économie et la finance. Avant de se joindre à iA en 2013, il a occupé divers postes dans le secteur de l’économie à l’Autorité des marchés financiers, chez Desjardins et au ministère des Finances du Québec. Sébastien est titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat en économie de l’Université Laval et détient le titre de CFA.

Sébastien Mc Mahon, Alexandre Morin et Marc Gagnon

Ce balado ne doit pas être copié ou reproduit. Les opinions exprimées dans ce balado reposent sur les conditions actuelles de marché et peuvent changer sans préavis. Elles ne visent nullement à fournir des conseils en matière de placement. Les prévisions données dans ce balado ne sont pas des garanties de rendement. Elles impliquent des risques, des incertitudes et des hypothèses. Bien que ces hypothèses nous paraissent raisonnables, il n’y a aucune assurance qu’elles se confirment.

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2025-01-28 11:35 HNE
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