L’impact de l’inflation sur la philanthropie

La philanthropie a plusieurs visages. Même si l’inflation récente a réduit le portefeuille caritatif des particuliers, ceux-ci peuvent néanmoins contribuer différemment à la communauté. Pour les entreprises, par ailleurs, la philanthropie bien exercée constitue un vecteur d’attraction et de rétention pour les employés et employées. À l’approche des fêtes, notre experte couvre le sujet.

Ashleay : Bienvenue au balado À vos intérêts! Je m'appelle Ashleay et je suis accompagnée de mon collègue Sébastien Mc Mahon. Cette semaine, on reçoit notre collègue Catherine Tardif, chef de la philanthropie, pour nous parler de la façon dont l'inflation impacte le nombre de dons que les individus peuvent faire et donc l’impact sur la philanthropie. Alors, salut Catherine! Salut, Sébastien!

Catherine : Bonjour! Ça va bien?

Sébastien : Ça va très bien, Catherine. Toi?

Catherine : Oui, très bien, merci.

Sébastien : C’est un plaisir de parler de philanthropie encore. À la fin de l'année, on a cette petite tradition là – le temps des fêtes s'en vient – où on parle des façons dont on peut aider. Comment est-ce qu'on peut donner? Donc merci d'être avec nous encore une fois cette année.

Catherine : Plaisir!

Ashleay : Oui, c'est ça. Tu es venue l'année dernière, dans le fond, Catherine?

Catherine : Oui, tout à fait. Merci pour cette belle invitation, ça me fait toujours grandement plaisir de venir parler de ce beau sujet qu'est la philanthropie, surtout au mois de novembre. Il me semble que ça se prête bien avant les fêtes.

Sébastien : Oui, tout à fait, tout à fait.

Ashleay : Puis là, on parlait de la situation économique, dont les ménages subissent les contrecoups. Ils vivent parfois une pression financière. Catherine, au-delà des dons en argent, qu'est-ce qu'on peut faire?

Catherine : C'est sûr, les organismes ont besoin d'argent, on ne peut pas le nier. Si on n'est pas en mesure d'aller là pour des raisons qui appartiennent à tous et à chacun, il est quand même possible d'aider autrement. Le bénévolat, c'est un très bon exemple. C'est sûr, comme je le mentionnais, ils ont besoin d'argent, mais souvent ils ont besoin de bras. Ce qui est super là-dedans, ce sont pour moi, en fait, les opportunités que le bénévolat offre : les rencontres tellement enrichissantes qu'on peut faire... Pour moi, d'un point de vue plus personnel, impliquer la famille, c'est une façon de redonner au suivant, mais aussi une façon d'inculquer ces valeurs-là à mes enfants, à cette prochaine génération-là de jeunes qui pourront à leur tour contribuer à leur communauté. On le sait, tout passe ou presque dans l'éducation. Donc, je crois vraiment que si, jeunes, on peut les sensibiliser notamment aux inégalités sociales, à l'importance de redonner, c'est un très, très bon début.

Sébastien : Puis les inégalités sociales, il y en a toujours eu, mais dans les dernières années, on a vu que le fossé s'est creusé. Tu sais, nous, les économistes, on aime toujours ça utiliser des images. Quand on a eu la pandémie, on se demandait si ça allait être une reprise en V, où on descend puis après ça on rebondit rapidement, ou une reprise en L, où on descend puis après ça on reste à un niveau plus bas, plus longtemps. Puis là, on se rend compte que c'est un peu une reprise en K qu'on a. Donc tout le monde a reculé un peu, mais il y en a, les plus chanceux de notre société, qui ont des actifs, un fonds de pension, une maison, bon, bien, les prix des maisons ont augmenté, les marchés vont bien, donc ces gens-là se sont enrichis davantage. Maintenant, les gens qui étaient peut-être locataires, qui n’ont pas d'actifs, ont fait face à de l'inflation plus élevée, des taux d'intérêt plus élevés. Le marché du travail, oui, les salaires moyens ont augmenté plus vite que l'inflation, mais le Canadien moyen, ça n'existe pas, un Canadien moyen. Il y en a des plus riches, il y en a des moins riches. Il y en a maintenant qui ont plus de capacités pour donner, mais il y en a maintenant qui ont des besoins beaucoup plus élevés. Puis on en parlait, Ashleay, avant de commencer, quand on avait reçu Isabelle Genest, de Centraide. Elle disait qu’ils aidaient des gens puis qu'il y avait des gens qui allaient à l'épicerie, puis… Juste de voir le prix de la viande, maintenant, c'est décourageant pour certains qui n'ont pas les moyens de suivre cette inflation-là. Donc, on peut aider avec des dons, mais si on n'a pas les moyens d'aider avec de l'argent, comme tu dis, il y a beaucoup d'autres options, là.

Catherine : Oui, tout à fait. Puis, tu sais, souvent, les gens me demandent : « Combien donner? Quel don a du sens? » Pour moi, ça peut paraître cliché, mais je crois fermement que le petit don n'existe pas. L'important, c'est de donner à la hauteur de nos moyens. Puis je crois vraiment que quand donner fait partie de ton ADN, ça devient comme une habitude, je crois que c'est déjà ça de gagné. Puis ça se peut, on le sait, qu’il y ait une année où on est un petit peu plus serré, où on a moins les sous pour donner. C'est correct, ça fait partie de la vie, mais je pense que tu peux ajuster ton budget philanthropique en conséquence. Mais l'important à la fin de la journée, pour moi, c'est de faire ce petit geste-là, puis de créer une habitude, en fait, de donner.

Ashleay : Absolument. Tu parles de créer une habitude. Tu sais, justement, avec Zoé, à chaque année depuis qu'elle a, je pense, deux ou trois ans, on s'en va aux Chevaliers de Colomb, à l’Arbre enchanté. Puis on va acheter un cadeau, dans le fond, pour des amis, pour les gens qui ne connaissent pas ça. Puis tu sais, ça arrivait souvent quand elle était plus jeune, je montrais, mettons : « Oh! Regarde! Elle, elle veut des bottes d'hiver! » Puis là, tu sais, Zoé, ma fille, elle disait : « Bien, voyons, j'en ai, moi, des bottes d'hiver. » Puis là, je disais : « Ben oui, imagine si tu n’en avais pas, tu aurais froid. » Ce qui fait que ça l'a comme habituée. Puis depuis ce temps-là – tu sais, là, elle est rendue grande, elle a douze ans – maintenant, tu sais, c'est elle qui me demande : « Quand est-ce qu'on y va, là, à l'Arbre? J'ai hâte de faire mes dons, mes collectes! » Elle aime ça aller magasiner, aller faire des surprises. Puis même, tu vois, cette année, on va emballer. Puis les gens étaient super contents, juste de ce geste-là, d'aider à faire les paniers, d'aider.

Catherine : Ça va créer une habitude pour elle aussi, puis elle va le faire avec ses enfants plus tard.

Ashleay : Exactement. Alors je pense que c'est vrai : il n’y a pas de petits dons. Voilà!

Sébastien : Il n’y a pas de petits gestes non plus. Et les années passent, puis les besoins restent. Dans les statistiques qu'on regardait récemment, on voit qu'il y a un Canadien sur cinq qui sera touché à un moment dans sa vie par une maladie mentale, avec toutes les conséquences qui viennent avec ça sur ta capacité de travailler, ta capacité de t'occuper de toi-même. Là, tantôt, on parlait d'inflation, puis on parlait de conjoncture économique. Le recours aux banques alimentaires, il y a des statistiques qui sont sorties de 2023 où on avait atteint les niveaux les plus élevés de l'histoire du Canada. Il y a certains mois, il y avait près de 2 millions de visites dans un seul mois. Puis au Québec, il y a plus du tiers des personnes dans le moment qui souffrent d'insécurité alimentaire qui sont des enfants. Donc les enfants souffrent de ça. Puis comment est-ce qu'on peut les aider? Bien justement, il n'y a pas de petits gestes ici. Donc, en plus, comme bonnes entreprises citoyennes – tu es impliquée là-dedans, Catherine – les organismes ne peuvent pas prétendre qu'ils vont tout changer, mais ils ont certainement un rôle à jouer vis-à-vis de la communauté. Puis ils peuvent agir comme un acteur de changement.

Catherine : Oui, tout à fait. Puis tu sais, je rebondis sur ce que tu dis en lien avec les banques alimentaires. Tu sais, j'en visite, là, je me présente sur place, il y a des files d'attente incroyables. Puis ce sont des gens, parfois, qui sont habillés en tailleur. Tu sais, ce sont de nouvelles clientèles de personnes qui fréquentent les banques alimentaires, malheureusement. Ce n’est pas juste aux nouvelles, là, c'est vraiment sur le terrain, ça existe à travers le Canada. Donc, je voulais juste faire un petit peu de pouce sur ce que tu disais. Puis tu as raison, comme bonnes entreprises citoyennes, les organisations ont un rôle à jouer. Pour moi, la philanthropie en entreprise peut prendre différentes formes. Il y a plein de choses qu'on peut faire, mais à la fin de la journée, on doit poursuivre cette espèce d'objectif commun là, notamment celui de maximiser son impact au sein de la communauté dans laquelle on évolue et de contribuer à faire une différence. Cela peut passer notamment par des campagnes de levées de fonds à l'interne. On en fait une belle, chez iA, avec Centraide, puis ça peut être très facile. L'organisation peut être tout simplement un facilitateur en intégrant notamment le don à la source pour les employés. C'est hyper facile de donner de cette façon-là. Ça va sur la paye. On ne voit pas ça passer. Un dollar par jour sur notre paye, ça permet à 30 personnes de repartir à la maison avec une épicerie complète et des plats cuisinés. Tu vas peut-être me dire que 1 $ ce n'est pas grand-chose, mais c'est la force du groupe qui fait vraiment une différence. On peut parler aussi du bénévolat. J'en parlais tout à l'heure, mais le bénévolat des employés, soit en soutenant financièrement les causes dans lesquelles les employés s'impliquent, c'est hyper motivant. Nous, on l'entend à l’interne. C'est très motivant de savoir que son employeur les soutient. On pense aussi à un bénévole d'expertise. On peut offrir justement de notre expertise à un organisme qui a besoin d'en apprendre davantage, notamment sur la communication, sur la dotation. Donc on vient apporter une valeur à cet organisme-là, qui parfois n'a pas nécessairement les moyens pour engager des ressources. On parle aussi de la notion de jumelage, qui peut être très motivante aussi pour les employés : un employé fait un don et l'employeur contribue aussi. Donc c'est un gagnant-gagnant pour tous.

Sébastien : Oui, puis tu as parlé des habitudes. Tu sais, on en a parlé beaucoup ici pour de l'épargne, pour atteindre ses buts à long terme, c'est de prendre des habitudes. Cotiser à chaque paye à son REER, par exemple, c'est la même chose. Si tu fais un don à chacune de tes payes, puis ça part automatiquement, bien tu n'as pas besoin d'y repenser, ton argent a un impact. Puis après ça, c'est de garder ces bonnes habitudes-là à long terme.

Catherine : Reçu fiscal, aussi.

Sébastien : Oui, exactement. Tu as un reçu fiscal. Puis aussi, comme tu disais, pour recruter aussi de la main-d'œuvre : la fidélisation, la mobilisation, l'engagement des employés… On en entend parler de plus en plus, chez nous, chez iA, quand on embauche des jeunes. Mais il n’y a pas juste chez nous. Il y avait un article de La Presse paru en novembre dernier qui mentionnait que la pénurie de main-d'œuvre continuait d'affecter les entreprises un peu partout, notamment au Québec. Puis les entreprises doivent se démarquer pour attirer les talents. Puis maintenant, la philanthropie peut être un levier pour l'attraction et la rétention de talents. Les jeunes vont être attirés chez un employeur qui a un impact dans son milieu.

Catherine : Ça résonne tellement pour moi. Je trouve ça extraordinaire. Puis tu sais, les études le démontrent, là, tu sais. Je suis convaincue que oui, que ça a vraiment un impact, que les candidats seront davantage séduits par un employeur qui a un impact positif sur la société, puis qui partage aussi ces mêmes valeurs-là, de solidarité, d'entraide. Je suis convaincue que ça a un lien très fort. On peut aussi penser aux opportunités de team-building que les activités de bénévolat procurent, qui ont aussi une valeur non seulement pour les employés, mais pour les organismes qui en bénéficient, de ce temps de qualité là.

Sébastien : Oui, tout à fait. Puis quand on arrive à la fin de l'année, on commence toujours à penser à des résolutions. « Comment est-ce que je peux être meilleur l'année prochaine? » On a tendance à penser : « Je vais m'entraîner plus souvent, je vais lire plus, je vais apprendre une nouvelle langue… » Mais pourquoi ne pas dire : « Je vais essayer d'aider plus ma communauté et mon prochain. » C'est valorisant! On contribue à notre société, on est plus utile et ultimement, ça nous fait grandir.

Ashleay : Oui, puis des fois, c'est carrément dans notre propre famille. Je pense à ma tante que j'adore, mais elle n’ose pas me déranger. On ne veut pas déranger. Oui, mais tu sais quoi? En allant « dépogner » son Internet ou son imprimante tout simplement, tu viens d'épargner une couple de semaines de non-impression!

Sébastien : Exactement.

Ashleay : Alors des fois ça peut être des tout petits gestes. Pas obligé d'aller trop gros non plus.

Catherine : Oui, tellement! Pour lutter contre l'isolement, aller voir des gens qui n’ont pas beaucoup de visite…

Ashleay : Tout à fait.

Catherine : Puis tu sais, je pense vraiment que l'important à la fin de la journée, tu parlais de résolutions, Sébastien, si on donne déjà, si on a les sous pour le faire, c'est peut-être de prendre un petit moment de recul puis voir « est-ce que je suis capable de faire un petit peu plus? » Si on est capable, bien sûr. Puis si on n'a pas l'habitude de donner, ce qui est correct aussi, bien peut-être de prendre le temps de s'informer, de trouver peut-être une cause qui a du sens pour nous, qui nous interpelle, pour voir comment on peut soutenir cette cause-là. D'une action philanthropique aussi modeste qu'elle peut sembler pour la personne, je crois que naît souvent une grande satisfaction, comme tu le disais Sébastien, puis un sentiment de bien-être. Parfois, je dis que c'est comme du dessert : quand on commence, on ne peut plus arrêter.

Ashleay : C'est ce qui conclut notre épisode de cette semaine, justement. Si c'est comme du dessert, allons-y, on va commencer une belle recette ensemble! Merci encore, Catherine, d'être venue avec nous. C'est toujours intéressant de t’avoir pour nous aider à y voir plus clair sur notre implication philanthropique.

Catherine : Un grand plaisir!

Sébastien : Merci, Catherine, c'est un plaisir de te recevoir.

Ashleay : Et puis merci à tous, à la maison aussi. Puis on se dit à la semaine prochaine! Vous avez aimé cet épisode et vous aimeriez en apprendre davantage sur l’actualité économique? Abonnez-vous à notre balado À vos intérêts! disponible sur toutes les plateformes. Vous pouvez aussi visiter la page Actualités économiques sur ia.ca et nous suivre sur les réseaux sociaux.

À propos

Sébastien possède près de 20 ans d’expérience dans les secteurs privé et public. En plus de son rôle de stratège en chef et d’économiste sénior, il est également gestionnaire de portefeuilles chez iA Gestion mondiale d’actifs et membre du comité d’allocation d’actifs de la société. Ces fonctions lui permettent d’exprimer sa passion pour les chiffres, les mots et la communication. Sébastien agit en tant que porte-parole de iA Groupe financier et conférencier invité sur les questions qui touchent l’économie et la finance. Avant de se joindre à iA en 2013, il a occupé divers postes dans le secteur de l’économie à l’Autorité des marchés financiers, chez Desjardins et au ministère des Finances du Québec. Sébastien est titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat en économie de l’Université Laval et détient le titre de CFA.

Sébastien Mc Mahon et Catherine Tardif

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