Ashleay : Bienvenue au balado À vos intérêts! d’hier, groupes financiers dans lesquels on discute de l'essentiel de l'actualité économique et de ses impacts sur vos finances en moins de dix minutes. En 1981, le taux directeur était au-dessus de 20 %. Jusqu'où iront les taux d'intérêt? Mon nom est Ashleay. Je suis en compagnie de mon collègue Sébastien Mc Mahon, notre stratège en chef et économiste sénior chez iA Groupe financier. Bonjour Sébastien.
Sébastien : Bonjour Ashleay.
Ashleay : Alors, peux-tu utiliser ta boule de cristal pour nous parler un petit peu des taux d'intérêt dans le futur? Mais avant, qu'est ce qui s'est passé aujourd'hui?
Sébastien : Regardez, on est le 26 octobre aujourd’hui. Je viens juste d'avoir une décision de la Banque du Canada. Le taux directeur a augmenté encore une fois de 50 points de base ou 0,5 %. Donc, si on refait le film, là, on a commencé l'année 2022. Les taux d'intérêt étaient au plancher à 0,25 %. On ne descend jamais jusqu'à zéro. Là, on arrête à 0,25 %. Donc, c'était le plancher. Et puis, là, on avance le film. On est rendu le 26 octobre, puis les taux d'intérêt ont augmenté beaucoup. On est rendu à 3,75 %. Quand je dis des taux d'intérêt, je devrais dire le taux directeur de la Banque du Canada qui, lui, a un impact sur tous les autres taux d'intérêt. On a eu des hausses de 25 points de base, des hausses de 50, hausses de 75, une hausse de 100 points de base, cette année. Donc, la Banque du Canada, comme les autres banques centrales, on est en train de se battre contre l'inflation, on met les pieds sur le frein et aujourd'hui, on a un autre coup de pied sur le frein.
Ashleay : Est-ce que c'est quelque chose qui t'a surpris?
Sébastien : Euh. Ce n'était pas surprenant de voir une hausse du taux directeur aujourd'hui! On s'attendait à ça. Je te dirais que les marchés, quand on regarde l'action des marchés, quand on regarde le consensus des économistes sondés par les grandes firmes internationales, il y en avait. Il y en avait qui pensaient 50, il y en avait qui pensaient 75. Nous, de notre côté, on s'attendait à 75 parce que la Banque du Canada, son gouverneur, monsieur Macklem, récemment, il était assez « vocal » sur l'importance de se battre contre l'inflation. Quand on se dit est assez sérieux, probablement qu'on pourrait avoir 75 points de base. Finalement, on a eu un petit peu moins. Donc ça, c'est une bonne nouvelle en soi. Mais ce qui a été surprenant quand même, c'est vous savez, la Banque du Canada, ce n'est pas une entité mystérieuse là qui est en train d'essayer de jeter l'économie par terre. Là, il communique beaucoup. Puis ce matin, on avait un communiqué de presse qui annonçait la décision. On avait un rapport sur la politique monétaire. Si vous aimez l'économie, je vous encourage à aller lire ça. Là, il y a beaucoup d'informations là-dedans. Et puis on avait une conférence de presse de monsieur Macklem, donc c'est trois choses-là. Puis, récemment, monsieur Macklem parlait beaucoup du fait que le l'inflation soit installée, que l'inflation, on doit la combattre. Mais là, maintenant, on commence à parler moins de ça et on parle plus du dommage économique qui est en train de se créer avec la hausse du taux directeur depuis le début de l'année. Donc ce pivot-là était assez surprenant quand même aujourd’hui.
Ashleay : Je vois et est-ce que c'est juste chez nous?
Sébastien : C'est partout dans le monde. Partout dans le monde, les banques centrales. Il y a juste la Chine qui est dans une situation différente. On a encore le COVID zéro là-bas comme politique. Donc, même la Banque centrale de Chine coupe le taux d'intérêt là-bas. Mais on pourrait faire un podcast, un balado juste là-dessus. Mais quand on regarde aux États-Unis que la Réserve fédérale en Europe, avec la Banque centrale européenne, en Angleterre avec la Banque d'Angleterre, partout on se bat contre l'inflation. Ce n'est pas juste chez nous qu'on voit ça.
Ashleay : Puis, est ce que ça peut devenir encore pire les taux? Est-ce que, jusqu'où ça peut aller?
Sébastien : On pense que le taux directeur peut augmenter encore, même qu'on pourrait se diriger vers quatre et demi, 5 %. Donc on est à 3,75, donc on pourrait avoir encore quelques hausses quand les banques centrales vont arrêter de resserrer. C'est une très bonne question. Aujourd’hui, on aurait aimé ça avoir peut-être quelques indications là-dessus. Il n’y avait rien. Je dirais que le consensus encore des économistes, puis ce qu'on voit dans les marchés, c'est que, aux alentours du mois de mars 2023, on pourrait avoir terminé. Donc t'as à peu près quatre et demi 5 % sur le taux directeur. Il ne faut pas penser qu'on va s'en retourner nécessairement dans les années 80, comme tu disais tantôt que le taux dépassait 20 % en 1981, même si nos parents ou nos grands-parents nous parlent que maintenant ces années-là les taux directeur étaient élevé. Mais une des raisons, c'était que l'inflation était quand même très forte dans les années 70, début des années 80, puis les années 80. Ça a été la décennie qui a été choisie. Ils ont été forcés de le faire. Mais les banquiers centraux pour combattre l'inflation, la ramener à un niveau plus bas, plus prévisible. Donc on est parti des années 80 avec une inflation très élevée, donc des taux d'intérêt très élevés pour la combattre. Puis, quand on a fini la décennie des années 80, on est arrivé dans le début des années 90 où il y a eu des cibles d'inflation qui ont été mis en place chez nous, entre autres. Le premier, ça a été la Nouvelle-Zélande à mettre une cible de 2 %. Donc maintenant, on est dans un environnement d'inflation quand même contrôlé. Donc on pourrait aller à quatre et demi, cinq. Mais au-delà de ça, ce serait surprenant. Avec l'information qu'on a.
Ashleay : Aujourd'hui, je ne comprends plus. Là, on dit quatre de mes cinq. Si on pense aux taux qui sont affichés, par exemple pour un taux hypothécaire ou quelque chose, ça veut dire qu'on pourrait potentiellement monter jusqu'à du 8 %.
Sébastien : On pourrait se rendre jusque-là si on regarde avant la décision de la Banque d'aujourd'hui. On voyait des taux affichés à six et demi, 7 %. C'est sûr qu'on peut toujours négocier un taux hypothécaire, mais ce qui était affiché, c'est sept et demi, six et demi, sept. Si on rajoute le 50 points de base aujourd'hui et qu'on en rajoute encore une autre, 75 éventuellement. Bien oui, on peut s'en aller aux alentours de 8 % comme taux affiché. Ce qui est très loin de ce qu'on avait disant en 2021 ou début 2022. On connaît tous des gens qui ont un taux d'intérêt sur leur hypothèque qui est très faible. Il y en a qui parlent en bas de 2 %. Tu peux du 2 % dépendamment si on a signé en 2020 21 22? Bien là, si quelqu'un signe aujourd'hui, c'est des paiements qui sont vraiment supérieurs à ce que les autres chanceux qui ont signé pendant la pandémie se retrouvent avec.
Ashleay : Et là, justement, si on est dû pour renouveler notre hypothèque, qu'est-ce qu'on fait?
Sébastien : Bien. Je vous dirais que si on est dû pour renouveler et qu'on a un taux fixe, puis qu'on passe à un autre taux fixe, il va y avoir, il va y avoir un bond, il va y avoir une bonne marche. Et puis ce qu'on vous recommanderais, c'est si vous signez fixe parce que vous aimez la prévisibilité. Bien fixe. Cinq ans. C'est peut-être une moins bonne décision, peut être fixe de moins d'années, le moins d'années qu'on peut. Si vous êtes prêt à prendre un peu de volatilité aujourd'hui, signer un taux variable bien. Les taux étant élevés, probablement que les taux de taux directeurs pourraient rester élevés une bonne partie de 2023 ou même toute l'année 2023 si on voit éventuellement un ralentissement économique ou l'inflation qui est battue par les banques centrales puis que les taux commencent à baisser, c'est peut-être une histoire de 2024. Donc un taux variable peut être vous permet de. Oui, on ne paye plus aujourd'hui, mais de bénéficier d'une éventuelle coupure des taux directeurs. Donc je vous dirais que ça dépend de vos préférences. Si vous êtes prêt à prendre un petit peu de de mouvements variables, ça peut avoir du sens, sinon fixe. J'encourage fortement à pas vous barrer un taux pour le trop long terme.
Ashley : Je comprends. Et donc comment est-ce qu'on peut vivre là avec les taux d'intérêt qui sont plus élevés?
Sébastien : Bien. Il y a des taux d'intérêt élevés, puis il y a l'inflation. Il y a ces deux défis là. La Banque du Canada elle-même fait des sondages, puis elle publie ses résultats il n'y a pas longtemps. Puis, pour exactement cette question-là aux gens, l'inflation les taux d’intérêt élevés. Qu'est-ce que vous faites pour vous adapter? Bien acheter, mieux, acheter moins? C'est ce qui sortait beaucoup. Magasiner les soldes peut être arrêter de se créer des besoins, peut être retarder des achats importants quand on le peut. Donc c'est toutes des solutions qui sont possibles. Parce que faut pas oublier que l'inflation, même si on voit que le taux a commencé à baisser mais d'inflation depuis cet été, bien l'inflation à l'épicerie ça, ça accélère encore. On est rendu à 10 %. Donc changer les habitudes, il est encore temps. Puis encore des gens qui vont être obligés de changer leurs habitudes prochainement.
Ashleay : Absolument. Puis est ce que ça veut dire qu'une récession est inévitable.
Sébastien : Inévitable? Je dirais que non. Même nous, notre scénario, on, c'est notre scénario de base qu'on a une récession en 2023. Mais on a quand même une probabilité d'environ 70 %. Ce n'est pas, ce n'est pas 100 %. Mais une récession, on peut voir comment ça se forme facilement. Si les gens commencent à perdre du pouvoir d'achat à cause de l'inflation, on peut acheter moins de choses, on paye aussi cher, mais on a moins pour notre argent. Si on commence à acheter plus intelligemment, on commence à retarder des besoins. On voulait changer de taux, on va attendre une année, on voulait s'acheter une nouvelle maison. On va peut-être attendre que les prix baissent un peu bien ça. Comme je dis souvent, une récession, c'est les gens qui gardent l'argent dans leurs poches. Donc en retardant tout ça, c'est une croissance économique plus faible. Donc c'est comme ça que ça peut naître une récession, donc ce n'est pas inévitable. Mais je vous dirais que c'est quand même notre scénario de base.
Ashleay : Je comprends et c'est ça. Ça ne veut pas dire que tout d'un coup, tout le monde est pauvre à cause qu'on est en récession, non?
Sébastien : Tout à fait. Ça ne change pas nécessairement la valeur de vos avoirs. C'est sûr que les marchés, les actifs que vous avez investis peut-être dans votre fonds de pension, dans votre REER, dans votre CELI. Quand il y a une récession qui s'en vient, les marchés sont en train de se comporter clairement comme si une récession s'en vient. Donc, on a des reculs là. Mais non, ce n'est pas parce qu'il y a une récession que tout d'un coup, il y a de l'argent qui est aspiré de vos poches puis qui est envoyé ailleurs. C'est simplement c'est simplement un passage obligé.
Ashleay : Je comprends. Et l'immobilier est ce que c'est destiné à s'effondrer?
Sébastien : Euh. Ce n'est pas vraiment destiné à s'effondrer. Je dirais qu'il y a des vents de face importants quand même dans les deux dernières années et quelques. Disons fin 2019 à fin 2021, les prix des maisons ont augmenté beaucoup parce que les taux d'intérêt ont été amenés au plancher. Donc, si les taux d'intérêts vont plancher, ça fait pousser le prix de l'immobilier. Bien quand on prend les taux d'intérêt et on les montre très rapidement. Bien logiquement, ça fait baisser le prix des maisons, puis on commence à voir l'effet. Quand on dit que c'est dans les en 2019 puis 2021, c'est 50 % de hausse sur le prix de la maison moyenne au Canada. Ce n'est pas toutes les régions, c'était 50 %, mais quand même bien. Il faut redonner un bout. Puis déjà dans les trois derniers mois, quand on voit les prix des maisons existantes. Si j'achète ta maison, tu achètes la mienne, donc pas de la construction neuve. On a vu que les prix ont commencé à baisser il y avait un mois de -1,5, puis un autre mois de -2.51 autre mois de -3,5. Donc si on additionne tous ces reculs-là, on est déjà rendu à pratiquement moins 10 % en trois mois. Donc, est ce qu'on va perdre quinze, 20 ou 30 %? C'est difficile à dire, mais je vous dirais que le mouvement est vraiment lancé.
Ashleay : Je vois. Alors merci beaucoup Sébastien. On apprécie grandement.
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À propos
Sébastien possède près de 20 ans d’expérience dans les secteurs privé et public. En plus de son rôle de stratège en chef et d’économiste sénior, il est également gestionnaire de portefeuilles chez iA Gestion mondiale d’actifs et membre du comité d’allocation d’actifs de la société. Ces fonctions lui permettent d’exprimer sa passion pour les chiffres, les mots et la communication. Sébastien agit en tant que porte-parole de iA Groupe financier et conférencier invité sur les questions qui touchent l’économie et la finance. Avant de se joindre à iA en 2013, il a occupé divers postes dans le secteur de l’économie à l’Autorité des marchés financiers, chez Desjardins et au ministère des Finances du Québec. Sébastien est titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat en économie de l’Université Laval et détient le titre de CFA.
Sébastien Mc Mahon
Vice-président, allocation d'actifs, stratège en chef, économiste sénior et gestionnaire de portefeuillesCe balado ne doit pas être copié ou reproduit. Les opinions exprimées dans ce balado reposent sur les conditions actuelles de marché et peuvent changer sans préavis. Elles ne visent nullement à fournir des conseils en matière de placement. Les prévisions données dans ce balado ne sont pas des garanties de rendement. Elles impliquent des risques, des incertitudes et des hypothèses. Bien que ces hypothèses nous paraissent raisonnables, il n’y a aucune assurance qu’elles se confirment.